FJK 021
Carpaccio Vittore (ca. 1465/68-1525/26)
Portrait d'une jeune femme de profil
ca. 1491
275 x 199 mm
Technique
Pierre noire avec rehauts de blanc sur papier bleu
Porte une inscription tardive du XVIIe siècle, au verso (par Marco Boschini ?): "di Vettor Carpatio Venezia"
Provenance
Collection Marco Boschini (XVIIe siècle)
Collection Dr. Michel Gaud
Vente Sotheby's Monaco, 20 juin 1987, lot 111
Collection Jan Krugier, Monaco, JK 4337
Fondation Jan Krugier
Expositions
Kupferstichkabinett, Staatliche Museen zu Berlin - Preussischer Kulturbesitz, Berlin, Linie, Licht und Schatten. Meisterzeichnungen und Skulpturen der Sammlung Jan und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 29.05 - 01.08.1999, cat. 12, p. 38; reproduction couleur p. 39;
Peggy Guggenheim Collection, Solomon R. Guggenheim Foundation, Venise, The Timeless Eye. Master Drawings from the Jan and Marie-Anne Krugier-Poniatowski Collection, 03.09 - 12.12.1999, cat. 14, p. 42; reproduction couleur p. 43;
Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, Miradas sin Tiempo. Dibujos, Pinturas y Esculturas de la Coleccion Jan y Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 02.02 - 14.05.2000, cat. 12, p. 52; reproduction couleur p. 53;
Musée Jacquemart-André, Paris, La Passion du dessin. Collection Jan et Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 19.03 - 30.06.2002, cat. 12, pp. 46-47; reproduction couleur p. 47;
Kunsthalle der Hypo-Kulturstiftung, Munich, Das Ewige Auge - Von Rembrandt bis Picasso. Meisterwerke aus der Sammlung Jan Krugier und Marie-Anne Krugier-Poniatowski, 20.07 - 07.10.2007, cat. 20, p. 56; reproduction couleur p. 57.
Notes
Notes (1)
Ce dessin est attribué à Carpaccio depuis le XVIIe siècle alors qu'il appartenait à l'historien d'art vénitien, Marco Boschini. Dans les deux catalogues de l'exposition de la collection Krugier-Poniatowski [Fondation Jan Krugier] qui ont eu lieu à Berlin et à Venise, Weniger a émis l'hypothèse que cette feuille a été dessinée d'après une figure de L'Apothéose de saint Ursule (Galleria dell'Accademia, Venise).
Le maître-autel de la Scuola Sant'Orsola, située à côté de l'église SS. Giovanni e Paolo, à Venise, est signé et daté "OPVICTORIS/CARPATIO/MCCCCLXXXI". Quoique certains historiens contemporains considèrent cette inscription apocryphe et qu'ils datent le maître-autel de la reconstruction de l'abside de la Scuola, en 1510, il paraît évident que ce dessin réalisé vers 1491 s'appuie sur un modèle original dont l'attribution s'avère exacte. En témoigne le style très différent de la Présentation du Christ au Temple (Galleria dell'Accademia) exécutée dix ans plus tard, vers 1510.
Carpaccio a terminé son apprentissage chez Giovanni Bellini vers 1488/1489, lorsqu'il est enregistré comme artiste indépendant et qu'il reçoit la commande des volets d'orgue de l'église Santa Maria dei Miracoli (Galleria dell'Accademia). Le premier "teler" du cycle de sainte Ursule date de septembre 1491. Pour sa première œuvre signée et datée de 1493 environ, L'Arrivée à Cologne, il n'a pas été retrouvé d'étude préparatoire, alors qu'il en existe pour d'autres épisodes narratifs. Sur une feuille recto-verso (autrefois dans la collection Gathorne-Hardy, Donington Priory) une tête de femme légèrement inclinée (recto) est proche quoique non exactement identique à celle de l'une des vierges du troisième rang, dans le milieu gauche, de L'Apothéose de sainte Ursule; au verso, le profil d'une jeune fille tournée sur la droite peut avoir été utilisée, malgré d'importants changements, pour la vierge qui tient un étendard sur la gauche du même panneau.
Ses études de têtes de femmes idéalisées, recourant à l'usage de la pierre noire et de rehauts de blanc sur papier bleu, préfigurent tous les dessins de sa carrière (cf. cat. 13). De telles feuilles étaient gardées dans l'atelier pour servir de modèles. La tête du recto par exemple réapparaît avec de nouveaux détails vers 1510 dans La Présentation, comme le profil du verso, fortement modifié, dans une autre tête de ce même maître-autel. Le cas de la Tête d'un jeune homme aux cheveux longs est différent (Pierpont Morgan Library, New York, inv. I 555): l'artiste a dessiné d'après nature la tête d'un membre de la confrérie destiné au bord gauche de L'Apothéose. Il possède la même expression que sur le tableau définitif, mais la touche du pinceau est plus fluide et plus spontanée, plus brillante aussi, et le lavis renforce l'aspect vaporeux de l'atmosphère. Je ne vois aucune raison d'affirmer que ces têtes ont été ajoutées ultérieurement au maître-autel. Les différences entre ces dessins s'expliquent, après son apprentissage, par l'acquisition de son propre style. La feuille Krugier-Poniatowski [Fondation Jan Krugier] se situe entre ces deux approches stylistiques. C'est une étude à la fois très vivante et déjà idéalisée d'une jeune fille plutôt trapue. Ses traits et son air de dévotion correspond à ceux de la figure située à l'extrême gauche du tableau. Nous connaissons quatre études pour L'Apothéose de sainte Ursule qui différent, chacune, de style et de technique. Toutes montrent cependant une maîtrise des formes et une souplesse de traits identiques. L'approche du dessin de Carpaccio s'explique par la formation qu'il a reçue dans l'atelier de Giovanni Bellini.
Je pense qu'il a commencé son apprentissage dans l'atelier de Gentile Bellini, après le retour de ce dernier de Constantinople en 1481 et qu'il a ensuite rejoint celui de son frère Giovanni. C'est là qu'il a produit des petites répliques des œuvres du maître jusque vers 1488-1489, après quoi il peint les volets d'orgue de l'église Santa Maria dei Miracoli. Pendant ces années, un certain nombre de dessinateurs vénitiens, parmi lesquels Alvise Vivarini, opte pour le lavis et le chiaroscuro parce qu'ils cherchent à accentuer l'effet plastique et esthétique de leurs compositions. Les membres de l'atelier de Giovanni Bellini sont familiers de cette technique comme le prouve le Paysage exécuté après La Résurrection de 1479 (Gemäldegalerie, Berlin). D'autres feuilles recourant au lavis et au chiaroscuro, tel le Saint Sébastien (British Museum, Londres, inv. 1895-9-15-800), montrent une bonne connaissance des dessins très aboutis de Nicolo Pizzolo et, dans une moindre mesure, de Mantegna. Bien qu'une attribution à Giovanni Bellini, vers 1465, soit séduisante, l'absence de documents comparatifs la rend spéculative. On sait que Carpaccio utilisait déjà le lavis et le chiaroscuro pendant son apprentissage - en témoigne sa Sainte Martyre (Ashmolean Museum Oxford). Que cette technique de dessin soit la sienne en 1493 n'est donc pas surprenant.
Roger W. Rearick, La Passion du Dessin, Musée Jacquemart-André, Paris 2002, pp. 46-47
Notes (2)
[Il s'agit d'une] Etude préliminaire pour la tête d'une des vierges de La Gloire de Sainte Ursule, peinte en 1491 par Carpaccio pour la Scuola di Saint'Orsola, se trouvant maintenant à l'Académie de Venise. Deux autres études de têtes féminines sont à mettre en rapport avec le tableau (voir M. Muraro, I Disegni di Vittore Carpaccio, Florence 1977, figs. 48, 49). Un autre dessin de Carpaccio, Etude de bras et de mains (Offices, inv. no 1470E), a été annoté de façon similaire par Marco Boschini, écrivain et amateur éclairé de peinture vénitienne qui vivait au 17ème siècle (voir Muraro, op. cit., p. 41, fig. 27).
Sotheby’s, Dessins italiens du XIVe au XVIIe siècle Collection Michel Gaud, Monaco juin 1987
Demande d'information/de prêt
La Fondation Jan Krugier se consacre au rayonnement de la collection de dessins en prêtant régulièrement des œuvres pour des expositions. Les demandes de prêt devront comporter une présentation complète du projet.